Au début de l’été 2021, Christophe Menuel, directeur de la Maison de l’environnement d’Arcueil, rayonnant sur l’ensemble du territoire Grand Orly Seine Bièvre, me proposait de produire un travail photographique sur le thème des déchets, afin d’illustrer une série d’évènements que sa structure allait organiser dans les prochains mois. La thématique était large et je bénéficiais d’une « carte blanche » quant à la manière de la traiter.
Après quelques recherches, je constatais qu’en photographie, les déchets sont souvent abordés sous l’angle documentaire (la filière de traitement, les acteurs du secteur…). Quelques photographes les mettent en scène de manière plus originale et particulièrement visible, jouant sur les effets de l’accumulation ou de la collection.
J’imaginais alors de travailler à contre-sens de toutes ces visions où le déchet est omniprésent dans l’image.
Et si, pour parler du déchet, une autre approche ne serait-elle pas au contraire de l’effacer à notre vue ? Les absents ont toujours tort en somme, et l’on ne parle jamais autant du sujet que lorsqu’il n’est pas là !
Nous sommes tellement habitués à la présence du déchet qu’en somme, nous ne le voyons (presque) plus. Dans chaque geste du quotidien, nous utilisons ce qui deviendra du déchet sur une échelle de temps très variable, d’ici quelques heures (l’emballage alimentaire), jusqu’à quelques années (notre voiture). Ces objets, déchets en devenir, se soustraient pourtant facilement à notre regard en tant que tels.
Quelque part, ils sont là pour nous servir, mais ils sont plus difficilement présents dans nos réflexions en tant que matières à jeter, trier, récolter, traiter ou recycler.
Afin d’illustrer cet antagonisme, je décidais donc de les mettre en scène sans les faire voir (en recourant aux techniques de photomontages et de modélisation 3D), d’essayer d’aboutir à ce que le lecteur se dise « il y a un truc qui cloche dans cette photo… il manque quelque chose », et qu’au bout du compte, le moins visible devienne le plus visible.
Axée sur les divers gestes du quotidien d’un foyer, la série ne porte pas de sens critique ou moralisateur sur nos habitudes, mais propose simplement d’inviter à la réflexion sur les notions de production, traitement et recyclage des déchets (peut-on tout recycler, dans quelles conditions, à quels coûts financiers et environnemental, indéfiniment ? ).
Elle porte enfin en elle l’idée que le meilleur de nos déchets est celui qui n’existe pas.
Le titre de la série était donc trouvé : « NO(s) DECHET(s) !».
Elle a été exposée en extérieur à compter du 23 novembre 2021, sur plusieurs communes du territoire du Grand Orly Seine Bièvre, jusqu’à la fin de l'année 2022.